El Puma tenait de la légende. Justicier de la classe ouvrière, défenseur des opprimés, fléau des exploitants. Pour certains démon ou esprit vengeur, un seul homme ou plusieurs. El Puma est rapidement devenu de ces légendes urbaines dont aucun
gringo ne souhaite croiser le chemin.
Légende, rumeur, superstition ? Le fait est que depuis son apparition, les crimes contre les latino-américains ont diminués. Des organisations de trafique d'êtres humains sont démantelées, les attaques de mines diminuent et les morts se font moins nombreux. En contre partie, sa tête est mise à prix. Faute de visage sur les affiches, el Puma devient un symbole.
1920 marque l'arrivée des Spéciaux à Sanlow. El Puma n'est alors déjà plus qu'une légende, un conte pour enfant hispanique, le personnage de livres jeunesse. Il n'est pas pourvu de pouvoirs, pas plus que son père et grand-père, el Puma avant lui. Il continue cependant de protéger, mettant ses talents au service des plus démunis. Il se balade en rue sous couvert de la nuit, vêtu de couleurs sombres, cape sur le dos et loup sur le visage. La rapière de ses ancêtres a laissé place à une lame cachée dans un parapluie. La pointe métallique est tranchante et suffit la majeur partie du temps sans qu'il n'ai besoin de révéler la lame.
Ses sauvetages sont tantôt associés à un Spécial, tantôt considérés comme des crimes. La vie d'un justicier n'est jamais toute rose et celui qui refuse toujours de se dévoiler au grand jour, préférant préserver la légende plutôt que l'homme derrière le masque est bien forcé de s'en acclimater.
Quelques années après l'apparition du premier Spécial, la femme d'el Puma donne naissance à un fils. En grandissant, celui-ci commence à développer des capacités spéciales. Il est doté d'une agilité, d'une force et d'une résistance au dessus de la moyenne humaine. Ses sens sont également plus développés. Son père l'entraine, lui apprend les leçons de vie léguées par son père avant lui. Lorsqu'el Puma décède des suites d'un combat, il laisse derrière lui une femme éplorée et un adolescent d'une quinzaine d'années. Lorsqu'il découvre l'héritage de son père et la lourde responsabilité qui lui incombe à présent, il n'a d'autre choix que de reprendre le flambeau d'el Puma. Si pas lui, qui ?
Plus étrange encore, Juanjo commence à sentir une certaine attraction entre lui et le sabre de son père. Au delà de la fascination, cette connexion semble réciproque. Il se découvre la capacité de la contrôler, pouvant l'attirer à lui pour se battre avec. C'est comme si le métal lui parlait une langue muette. Cherchant à la reforger pour qu'elle lui corresponde un peu plus, il découvre que le métal n'est pas commun mais plutôt du genre inconnu. Est-ce que ce don lui appartient ou appartient-il à la lame ? Le plus important est qu'ils sont à présent liés. D'une lame cachée dans le parapluie et une lame au bout de celui-ci, il reforge deux lames de longueur identique. Il leur donne des noms : Izquierda et Derecha.
Ses lames sont particulièrement réceptives à ses mouvements lors des combats. Il développe avec elles des techniques particulières et fait honneur à ses ancêtres.
Juanjo eut un fils qui eut un fils après lui, ce qui nous amène au petit Gabriel. Né à Santiago au Chili, il se rapproche de son grand-père à Sanlow alors qu'il est jeune adolescent. Si son père est urgentiste, lui préfère se rêver Super-héros. N'est-ce pas là le meilleur endroit pour de telles ambitions ? Il rêve des héros dont il a lu les aventures dans les comics, espère avoir un jour lui aussi une figurine à son effigie avec laquelle des tas d'autres gamins joueront. Il ne voit que ce que les médias leur montre, de fiers héros sauvant la veuve et l'orphelin.
En grandissant, Gabriel apprend à maitriser ses pouvoirs auprès de son paternel. Ils sont tous les deux ce qu'on appelle des Surhumain. Sens développés, agilité, résistance et force supérieur. Gabriel doit apprendre à se maitriser s'il ne veut pas faire de dégât autour de lui. Sa mère n'a aucun pouvoir mais un coeur aussi grand que la bêtise humaine. Elle enseigne des valeurs primordiales à son fils. S'il est fils unique, il sait ce qu'est le partage et la compassion. Lorsqu'on a d'aussi bons exemples dans la vie, il est plus aisé de rester sur le droit chemin. Le jeune chilien ne se démarque cependant jamais des autres. Il n'a pas de grands pouvoirs comme ses héros favoris, il a hérité du "pack de base" mais s'en contente. A l'école il se comporte comme se comporterait n'importe quel enfant normal. Il a de très bonnes notes et ses relations avec les autres élèves de son âge sont d'égaux à égaux. Il a de nombreux amis, certains préférant clairement se mettre en avant. Gabriel lui n'est pas du genre suiveur mais il n'est pas pour autant un leader né. Il se contente d'être là pour ses amis, veiller silencieusement. Sa présence est à peine remarquée mais ses absences laissent souvent un vide.
Vers la fin de son adolescence, et parce qu'il n'est pas toujours facile de cacher ses capacités aussi subtiles soient-elles, il est remarqué par une agence de super-héros. Il a des capacités physiques qui pourraient s'avérer utiles. Il sait se battre, il suit des cours d'escrime en plus de ceux que son père lui enseigne et il se montre très habile en sport de combat et parcours d'agilité. Dès sa sortie de l'école, il intègre une petite équipe sans prétention de super-héros, un genre de support pour les "vrais héros", une équipe dont le but sera de s'occuper des petits larcins. C'est un premier pas vers le super-héroïsme mais c'est un pas qu'il reçoit très bien. Il faut bien commencer quelque part et même la plus petite mission s'avère importante. Il devient
Vigilante (en espagnol mais l'agence oublie rapidement la langue pour lui favoriser l'anglais, soit disant plus facile pour le grand public et l'uniformité).
Des années à protéger et servir, des nuits blanches à surveiller la ville, à prendre en filature des bandits, à aider la police, les pompiers et parfois les ambulanciers. Gabriel n'a jamais rechigné au travail et sans doute y mettait-il trop de coeur. On ne lui a jamais proposé d'évoluer, de rejoindre une équipe dont les activités sont jugées par l'agence comme plus importantes. Vigilante est juste bon à faire traverser les gamins devant une école ou réguler la circulation pour permettre aux Super-héros de faire le travail sans blesser les citoyens (spoiler alerte, ça n'a pas toujours été une réussite). Confronté à la dure réalité du terrain, c'est la désillusion qui le gagne peu à peu. Fréquenter des super-héros ce n'est pas la même chose que les gamins du quartier.
« Plus vite, plus haut, plus fort ! » Plus cons surtout... Le monde se défigure d'année en année. Les riches s'enrichissent et la classe moyenne s'appauvrit et les pauvres meurent dans l'indifférence. Le rêve américain, les super-héros aux tenues extravagantes, une belle distraction, un enduit pour camoufler le reste. Gabriel dénote dans cette mascarade. Sa tenue est l'une des plus sobres, ses pouvoirs n'ont rien d'extraordinaires et il est loin d'avoir un caractère qui passe bien à la télé. Les têtes d'affiche sont elles-mêmes victimes de tout ce manège, exposés comme des bêtes de foire au point parfois d'en perdre leur humanité. Des surhommes, Spéciaux en opposition aux Normaux. Sanlow est un baril de poudre gigantesque dont la mèche se trouve entre les mains de businessmen. Les supers et les agences jouent le jeu des médias et les médias jouent le jeu des agences. La télé, les journaux, tous ne montrent que ce qu'ils veulent bien montrer. Un sauvetage in extremis ? On applaudit en oubliant bien vite la cause de l'accident ou le nom des victimes qui n'ont pas pu être sauvés. Et ceux qui sont sauvés alors, le sont-ils vraiment ? Combien de fois certains quartiers n'ont-ils pas du être reconstruits ? Combien de famille ne se sont-elles pas retrouvées à la rue ? Combien ont perdu leur emploi, ont été floués par les assurances ou se retrouvent la tête truffée de traumatismes pour le restant de leurs jours ?
Vigilante enchaîne les missions auprès d’aides humanitaires. Il est envoyé en Amérique latine pour aider les secours dans des lieux défavorisés victimes de catastrophes naturelles ou non. Son ouïe plus fine que la moyenne est bien utile pour retrouver des blessés supplémentaires sous les décombres. Il s’acharne à sauver les oubliés, les "dommages collatéraux". Sa vie est rythmée par son travail en tant que super-héros au dépend de sa vie privée. Si on lui connait une relation passée avec l’une de ses coéquipières, il reste cependant très secret sur sa vie sentimentale et pour cause, il n’entame pas de relation très sérieuse par manque de temps à lui consacrer et par le danger que son boulot pourrait représenter pour son.sa partenaire. Il se montre cela dit très proche de ses parents. Très famille, il veille à ce qu’ils ne manquent de rien et prend régulièrement des nouvelles du reste de sa famille, cousins, cousines, oncles et tantes.
C’est en mars 2022 que Joaquin Soto Romero trouve la mort, laissant derrière lui femme et enfant. La famille se réunit au complet pour honorer une dernière fois l’urgentiste. Depuis le jour de la mort de son père, Gabriel ressent quelque chose d’étrange, une sorte de vide au fond de lui et une envie irrémédiable de se rendre chez ses parents. Une fois dans leur maison, c’est vers la cave qu’il sent cette attraction et une fois dans la cave, vers une vieille armoire qu’il a toujours connu à cet emplacement précis. Il tourne autour de cet armoire plusieurs jours, cherchant à comprendre pourquoi elle l’intrigue autant si soudainement. Il fouille dedans à la recherche peut-être de vieux souvenirs. Il y trouve une série de vieilles photos qui le rendent nostalgiques mais rien qui n’apaise vraiment sa curiosité. C’est une semaine après l’enterrement alors qu’il aide sa mère à déplacer un autre meuble que l’envie de retenter quelque chose lui vient. Il retourne voir l’armoire et, en touchant un point précis de la fresque taillée dans le bois, active un mécanisme qui lui révèle une porte cachée donnant sur une pièce secrète.
Une fresque aux symboles inca orne le mur. Sur elle, la représentation d'un puma. Une petite statuette du même animal trône sur un bureau. La pièce n'est pas très grande mais contient tout ce qu'elle doit contenir. Sur le mur sont accrochés deux sabres, c'est vers eux que l'attention de Gabriel est portée. Il ressent un certain soulagement inexpliqué en les découvrant et en les touchant du bout des doigts. Il trouve, plié sur une chaise, un costume de super-héros assez sobre et modeste. Dans un tiroir du bureau il tombe sur un vieux carnet, celui-ci semble dater de près d'un siècle déjà tout en restant en très bon état. Il se met alors à en lire le contenu et découvre un pan caché de l'histoire de sa famille sans que jamais leur nom ne soit dévoilé.
Le temps passe, Gabriel expérimente ces nouvelles découvertes. Son lien avec les sabres semble fort, lorsqu'il les utilise pour s'entrainer, sa méthode de combat change du tout au tout et ressemble à s'y méprendre à celle qui a toujours été propre aux El Puma passés. Sa mère, seule personne au courant de l'existence du costume, lui confère soutient et conseils. Elle lui en apprend un peu plus sur ce qui lui arrive et bientôt, converti par l'idée, il raccroche son métier actuel en tant que super-héros. Officiellement, il devient chauffeur de taxis. Officieusement, il prend le relai d'El Puma et veille secrètement sur la ville et ses habitants et en particulier les communautés laissées pour compte. Son champ d'action se concentre principalement sur le quartier pauvre latino mais n'oublie pas les autres pour autant. S'il connaissait déjà très bien la ville de Sanlow, son métier de chauffeur lui permet de la connaitre sur le bout des doigts. Chaque route, chaque ruelle est encodé dans son cerveau. Il arrive parfois que son ancienne agence de super-héros fasse appel à lui lorsque nécessaire mais ses interventions en tant que Vigilante sont rares et se limitent la plupart du temps à des conseils et expertises pour aider les autres recrues, de plus en plus jeunes que lui.